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Les volontaires de guerre belges de la Libération
 
Paul Gennart
 
Début septembre 1944, la Belgique presque entière est libérée en quelques jours de l'occupation allemande par les troupes alliées qui avaient débarqué le 6 juin précédent en Normandie. Notre gouvernement avait prévu de lever sur les territoires libérés des troupes qui, après une formation accélérée, seraient mises à la disposition des commandements britannique et américain. Depuis plusieurs années, les esprits étaient préparés à répondre à une telle éventualité. En effet, dès la fin de la campagne de mai 1940, qui avait vu dans notre pays de nombreux faits d'armes, mais aussi des faiblesses et des défections regrettables, dans tout le pays des hommes et des femmes ont entamé des activités qui ont conduit à l'organisation de mouvements de résistance à l'occupant. Ceux-ci ont été alimentés par la suite par l'afflux dans la clandestinité de travailleurs requis par les Allemands pour remplacer dans leur pays les ouvriers mobilisés.
 
Tout ce monde constituait une importante réserve de recrutement. 53.700 Volontaires de guerre furent recrutés en 1944 et 1945. En y ajoutant les anciens militaires rappelés, les miliciens qui n'avaient pu être appelés pendant la guerre et les 5000 Belges qui, pendant la guerre, avaient choisi de rejoindre la Grande-Bretagne on cite le chiffre d'environ 100.000 militaires belges actifs à la fin de la guerre.
Parmi eux, je m'intéresserai tout d'abord et plus particulièrement aux bataillons de fusiliers, et principalement à ceux qui ont été engagés dans les opérations militaires avant la capitulation de l'Allemagne.
 
Dès le début octobre, les 6 premiers bataillons de fusiliers sont formés (3 flamands, 3 francophones) dans diverses casernes du pays. Leur instruction se passe dans des conditions difficiles : le bateau qui amenait les tenues de Grand Bretagne ayant été coulé par les Allemands, le début de l'instruction fut fait en civil, avant que des battle-dress de récupération puissent être fournis. L'armement est constitué principalement par des fusils anglais Lee Enfield, quelques mitraillettes Sten et fusils-mitrailleurs Bren. Après plus ou moins deux mois, ces bataillons sont mis à la disposition des Alliés, les trois premiers au 21e Groupe d'Armées (britannique), et les trois suivants au 12e Groupe d'Armées (américain). Ces 6 bataillons méritent une mention particulière, car, ayant été engagés dès le mois de décembre, ils ont vécu la période difficile de la bataille d'Ardenne, connue chez nous sous le nom d'offensive von Rundstedt, et participé de plus près aux opérations militaires.
 
Les bataillons suivants ont été mis à la disposition des Alliés à partir du 31 janvier 1945. A titre d'exemples, le 12e bataillon a été appelé à Charleroi le 11 décembre 1944, et mis à la disposition des Américains le 12 février 1945 ; le 16e bataillon - dont l'auteur de ces lignes faisait partie - a été formé à Bon-Secours le 15 janvier 1945 et mis à la disposition des Américains le 12 mars 1945. Ces deux bataillons ont suivi des parcours assez semblables. Dès le 10 mars, la 4e compagnie du 12e bataillon traverse le Rhin à Remagen sur le pont Ludenddorff, pris par surprise le 7 mars et encore utilisable. Le 15 mars, ce sont des éléments de la 2e compagnie du 16e bataillon qui traversent le Rhin, cette fois sur un pont de bateaux à Linz, le pont Ludendorff s'étant effondré entre temps. Une semaine plus tard a lieu le passage en force du Rhin à Wesel, en même temps que les troupes américaines de la tête de pont de Remagen lancent une offensive pour encercler la Ruhr par le sud. Les bataillons de fusiliers sont alors utilisés pour sécuriser les vastes régions non explorées par les blindés américains. Nettoyage de bois et capture de prisonniers sont leur tâche quotidienne.
 
Au moment de la capitulation, le 8 mai 1945, les deux bataillons se retrouvent en Thuringe, d'où ils durent se retirer pour laisser la place aux Russes. Le 12e fut regroupé à Cassel, le 16e descendit jusqu'aux environs de Nuremberg, avant de rentrer tous en Belgique. Quant au 17e bataillon, il avait été jusqu'en Tchécoslovaque, et participait à la libération de Pilsen.
Pour situer ces actions apparemment faciles dans leur contexte, il faut mentionner que pendant ces dernières semaines de la guerre se déroulait non loin de là la terrible bataille de Berlin, où les Allemands ont résisté jusqu'au dernier moment aux Russes. Du côté occidental même, les pointes américaines n'avançaient pas sans combat. Pour s'en convaincre, il suffit de lire Commandant de Compagnie, de Charles B. Mac Donald (Didier Hatier 1990). Entre le 3 octobre 1944 et le 8 mai 1945, ce capitaine de l'armée des Etats-Unis a reçu pas moins de 49 ordres d'opération, défensifs et offensifs. Il reçut le dernier le 6 mai en Tchécoslovaquie, près de Pilsen, le 6 mai 1945
 
En plus des bataillons de fusiliers, il faut citer aussi les autres Belges qui participèrent à la fin de la guerre. Au risque d'en oublier, je citerai :
 
- les troupes venues d'Angleterre : la 1ère Brigade (Brigade Piron), les Commandos et les Parachutistes, toutes unités qui firent leur plein avec des volontaires de la Libération
 
- les troupe du génie, en particulier les démineurs, qui payèrent un lourd tribut à leur dangereuse mission
 
- les 28 compagnies de transport automobiles mises à la disposition du commandement britannique
 
- les brigades d'Irlande, qui furent formées en grande partie de volontaires. Cinq brigades reçurent ainsi un entraînement complet en Irlande dans le courant de l'année 1945. Elles devaient être mise en action comme unités combattantes à part entière. Après la reddition de l'Allemagne, ces brigades ont été destinées à rejoindre l'Extrême-Orient pour continuer le combat contre les Japonais. Heureusement, le Japon capitula le 8 août après avoir subi les deux bombes atomiques de Hiroshima et Nagasaki, et les brigades d'Irlande constituèrent le premier noyau de notre nouvelle armée nationale indépendante.
 
Pour ce rappel, forcément assez succinct, les livres suivants ont été consultés : Les Volontaires de la Libération, de Lucien Champion (Ed. Collet 1985), Les Volontaires de Guerre Belges 1940-1945 et leurs insignes, de Jacques E. Champagne (Ed. G. Everling 1989), Aux Trousses du Bataillon Fantôme de Gustave Maison (le 16e Bataillon de Fusiliers), Ed. du Confluent 1994.